Le Blog-notes de Christophe COUNIL

R.S.A. : les lettres mais pas l'esprit

Le Revenu de Solidarité Active est dans son principe un beau projet. Pourtant il ne faut pas simplement s'arrêter sur la lettre mais aussi en saisir l'esprit.


Le projet de loi créant le RSA est à l'Assemblée Nationale depuis la semaine passée. Il est loin de répondre aux défis conjoints que sont l'insertion des personnes en grande précarité et l'augmentation de la rémunération des travailleurs pauvres.


J'y décèle quatre écueils majeurs.

 

Premier écueil : l'absence de mesure d'accompagnement du bénéficiaire qui a repris un emploi.

L'intéressement financier du bénéficiaire du RSA peut être un levier pour sa reprise partielle d'une activité, mais ce dispositif ne prévoit pas d'accompagnement des personnes une fois en poste. Le risque est donc grand de maintenir ces allocataires dans un temps partiel subi sans perspective.


Deuxième écueil : les employeurs ne sont pas associés au dispositif.

Qui dit insertion professionnelle dit entreprise. Or, là aussi, aucun engagement de l'employeur n'est envisagé. Le principe de la rentabilité économique s'imposera d'elle-même et les employeurs auront beau jeu de maintenir de bas salaires, sachant que par ailleurs leurs travailleurs auront droit à un « complément » issu de l'argent public.

 

Troisième écueil : l'instauration d'une « double peine ».

Chacun le sait, l'insertion professionnelle n'est pas la réponse à toutes les situations. Or, la loi du 1er août 2008 relative aux droits et devoirs des demandeurs d'emploi, conjuguée avec le dispositif du RSA (l'inscription obligatoire au Service public de l'emploi) amènera certains, qui auront refusé par deux fois des propositions d'emplois, à être radiés du service public de l'emploi et du RSA. « Double peine » en quelque sorte pour ceux dont nous savons que, trop éloignés de l'emploi, la réponse à l'enjeu de leur insertion n'est pas l'insertion professionnelle mais un suivi social personnalisé.

 

Quatrième écueil : un financement injuste socialement.

Comment devrait être financée une allocation de solidarité nationale, même quand celle-ci est différentielle ? A cette question, la réponse est : nouvelle taxe sur les épargnants, permanence du financement des départements et redéploiements. Fondamentalement, ce dispositif est injuste car, au-delà même des aménagements de dernière minute sur les niches fiscales, ce sont encore et toujours les classes moyennes qui financent, au travers d'impôts socialement injustes. Rappelons-le : à solidarité nationale devrait répondre financement national.

 


Rappelons enfin qu'il aurait été de bonne intelligence avant de supprimer le RMI, de remettre les compteurs à zéro et de faire un bilan financier depuis le transfert en décembre 2003 aux départements de la compétence. Car chacun connait l'écart réel entre les dépenses constatées par les départements et la compensation de l'Etat.


Face à ces constats, je formule le vœu que les parlementaires ne s'arrêteront pas à ces trois lettres et retrouveront l'esprit de ce projet en l'amendant beaucoup ou en s'opposant pour des raisons légitimes et justes.

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