11 Août 2023
Lors de sa réunion du 6 avril dernier, le Conseil municipal du Mans a adopté le budget 2023. Je vous propose de découvrir mon intervention prononcée au nom du groupe "Le Mans Évidemment" qui rassemble les élus socialistes, écologistes et progressistes de la municipalité.
Monsieur le Maire, mes chers collègues. Peut-être quelques mots au nom de notre groupe. D’abord saluer le travail des services qui ont accompagné les élus dans l’élaboration de ce budget. C’est toujours un travail de longue haleine qui demande à pouvoir concilier ce qui est réalisable avec ce qui est souhaitable.
Ce budget, cela a été dit, mais il faut insister, s’inscrit dans un contexte difficile, lié d’abord à l’impact de décisions nationales. Je ne me résous toujours pas à la suppression de la CVAE. On pourrait dire que la CVAE est certes supprimée, mais qu’elle est compensée. Je me méfie toujours des compensations ; nous les avons vécues au Conseil départemental depuis plus de 20 ans et au final, c’est toujours un marché perdant/perdant pour la Collectivité, parce que tout simplement, on perd deux choses. D’abord, le dynamisme de la taxe, ensuite, la capacité à pouvoir l’augmenter en cas de besoin et au-delà, on perd un lien qui existe entre les entreprises et le territoire ; les investissements que l’on peut être amené à faire sont aussi au bénéfice des entreprises. Et donc supprimer ce lien n’est pas forcément une bonne chose. Mais derrière tout cela, il y a une volonté nationale qui s’inscrit sur une longue durée, qui est de diminuer l’autonomie fiscale des Collectivités locales. Nous avons cette chance, nous, d’avoir encore un petit peu d’autonomie quand la Région et le Département l’ont perdue, mais quelle sera la prochaine mesure allant dans ce sens ? Je pense qu’il faut toujours le rappeler pour être en capacité aussi de le dénoncer.
Contexte difficile avec des incertitudes, Serge CIGANA l’a rappelé, lié aussi à d’autres décisions nationales. Par exemple, on ne sait pas aujourd’hui quelle va être l’évolution du point d’indice. On le mesure sur l’augmentation 2022 qui se répercute en année pleine sur 2023, mais y aura-t-il une augmentation en 2023 ? Personnellement, en tant que fonctionnaire, j’aurais tendance à le souhaiter ; en tant que gestionnaire d’une Collectivité, c’est toujours un peu plus compliqué. Je reviens à ce que je disais tout à l’heure entre le souhaitable et le réalisable. Le contexte. J’aurais tendance à dire que si on reprend les discours passés, on le retrouve toujours.
Et puis il y a le contexte général. Je ne parle pas des tensions liées à la réforme des retraites, mais de ce climat général qui fait que l’on subit des hausses extrêmement importantes qui nous pénalisent quand même très fortement. Serge CIGANA a rappelé tout à l’heure ce qui se passe en matière de fluides. On le voit, l’électricité : + 80 %, cela fait 2,2 M€ de dépenses. Le gaz : + 103 % : + 1,9 M€ de dépenses. Le chauffage urbain – dans le cadre du mixte énergétique, il est indexé sur l’augmentation des autres : + 79% ; 480 000 € supplémentaires. Vous additionnez ces sommes et vous obtenez la « modique » somme de 4 580 000 € de dépenses supplémentaires, alors même que nous réduisons dans le même temps nos consommations. Si on met ce chiffre de 4,5 M€ en parallèle avec notre épargne nette qui va se situer à 3/4 M€, en fait, on se rend compte qu’à peu près la moitié est globalement mangée par cette augmentation des coûts de l’énergie. C’est une vraie problématique qui impacte extraordinairement fortement notre budget. Ce contexte inflationniste impacte aussi d’autres dépenses. On peut penser par exemple aux fournitures alimentaires pour la cuisine centrale, aux travaux – Serge le disait tout à l’heure, on a eu un an de retard sur le lancement des travaux de Coubertin parce que l’on ne trouvait pas d’entreprise, et quand on en trouvait, c’était à des tarifs prohibitifs, et ensuite, on a le coût des matériaux qui fait que, vous le voyez très régulièrement parce que l’on revient devant vous avec des délibérations pour augmenter fortement le prix de nos opérations pour pouvoir les mener à terme. Tout cela pèse très fortement sur notre budget. C’est pour cela que, je l’avais dit lors du débat d’orientations budgétaires, de mémoire de vieil élu, je crois que j’ai rarement connu une période aussi difficile.
Pour autant, on fait des choix politiques – on est là pour faire des choix politiques – particulièrement forts. On peut les faire parce que malgré tout, notre Collectivité est en bonne santé financière. Premier choix politique, cela a été rappelé, mais il faut le marteler, il va falloir le rappeler régulièrement, c’est la fiscalité. Ce sont les tarifs des services. Ce que Stéphane LE FOLL appelle le Pacte pour le pouvoir d’achat. C’est un vrai choix que l’on fait.
On aurait pu faire un choix de facilité qui aurait été de dire que de toute façon, comme tout augmente, on augmente les impôts et on a une marge qui nous permet de voir l’avenir de façon plus sereine. Non. Au contraire, on a fait le choix de la contrainte. Je dois dire que beaucoup de Collectivités n’ont pas fait ce choix. Paris, c’est + 52 %. Grenoble, + 25 %, Metz, + 14 %, Lyon, + 9 %, Bordeaux, + 4,5 %, Limoges, + 10 %. Et puis il y a celles qui n’augmentent pas parce qu’elles ont fortement augmenté l’année précédente : Nantes, par exemple, a eu une très forte augmentation l’année dernière, ce qui fait que cette année, ils n’augmentent pas. Marseille avait augmenté de 14 % l’année dernière, ils n’augmentent pas cette année. Nous, on est sur une stratégie qui est quand même de maîtrise fiscale. On a fini le mandat passé sans augmenter les taux d’imposition, on l’a commencé sans le faire, sauf une année, + 1 %, l’année dernière, on n’a pas augmenté. Nous n’augmentons pas. C’est quand même un choix politique essentiel. Souvent, le contribuable dit qu’il entend des élus dire qu’ils n’augmentent pas les taux d’imposition, et ils voient leur impôt local augmenter. Oui. Parce qu’il y a la revalorisation des bases, dont on va malgré tout bénéficier, mais qui est par la loi de finance nationale indexée sur l’inflation.
Dans ce contexte, on aurait pu également réduire un certain nombre de services à la population. Non. On fait l’inverse. On renforce la majorité des services à la population, et on les renforce en plus en assumant par moment une gratuité. Cela a été rappelé tout à l’heure par Stéphane LE FOLL, la gratuité des musées, des médiathèques. On en voit le résultat aujourd’hui en termes de fréquentation. Mais il y a des gratuités qui sont tellement naturelles qu’on n’en parle plus. La gratuité, par exemple, des études surveillées le soir. Savez-vous que nous sommes la dernière grande ville de France à rendre ce service gratuit aux habitants ? C’est aussi un choix politique. On renforce un certain nombre de politiques, de services à la population. Quand, par exemple, le service enfance ouvre un nouveau centre de loisirs à la Madeleine, c’est renforcer les services à la population. Quand le service éducation étend le dispositif des petits déjeuners dans les écoles, c’est renforcer les services à la population. Quand on va signer bientôt le deuxième contrat local éducatif, artistique et culturel (CLEAC), c’est du renforcement des services à la population. Le CCAS, pendant très longtemps : 10 M€. On passe à 1 M€ de plus pour la solidarité. C’est un service à la population que l’on renforce. Je pourrais continuer en parlant du Centre municipal de santé Olympe de Gouges qui a été agrandi, et donc où plus de patients sont reçus, du renforcement des effectifs de la Police municipale. Autant de services que l’on renforce, malgré une situation contrainte.
Lorsque cela va un peu plus mal, la première chose que font beaucoup de Collectivités, je le sais parce que je le vis dans une autre Collectivité, est de diminuer les financements aux associations. C’est écrit derrière moi en gros, les subventions aux associations sont reconduites globalement au même montant que l’année dernière. On est à 4,7 M€ de subventions aux associations.
Maintien des investissements, cela a été dit, qui sont très importants. Surtout, ils s’inscrivent dans une stratégie qui se traduit dans le budget vert, d’une certaine façon, même si un certain nombre de choses sont contestables – et on peut les contester. Cette stratégie patrimoniale est de se dire que l’on regarde notre patrimoine en voyant comment on peut à la fois accroître le service aux habitants tout en étant en capacité de diminuer notre impact environnemental et aussi en théorie notre facture énergétique.
Quand par exemple cette année, on dépense 3,4 M€ aux Atlantides, on sait qu’avec cet investissement, on va autoproduire 22 % de l’énergie que l’on consomme aux Atlantides, alors même que c’est le principal consommateur d’énergie. Les Atlantides, à elles seules, représentent 8 % de la facture énergétique de la Ville. Si demain, on produit 22 % de notre énergie, c’est plutôt positif. Quand on investit 2 M€ à la Briqueterie, je ne vais pas revenir sur tout ce que l’on a dit lorsque l’on a fait cette cérémonie avec Jean JOUZEL, 1 M€ sur Coubertin pour rénover l’équipement – c’est ce que l’on a inscrit, et il faudra inscrire d’autres crédits plus tard – c’est 62 % d’économie d’énergie réalisés à terme. On voit donc très bien que nos investissements ont un impact. Cela se traduit dans le budget vert, avec 40 % qui sont classés « favorable » ou « très favorable » et 48 % « neutre » – cela me pose toujours question. Quand on reconstruit un gymnase qui a brûlé, on ne minéralise pas un espace, au contraire, on réutilise un espace. On fait un gymnase à la Briqueterie qui va être le seul bâtiment du département classé E3 (niveau maximum en termes de consommation et de production d’énergie) C1 pour le carbone (le niveau maximum est C2, on y est presque). Ce bâtiment est extraordinairement performant d’un point de vue énergétique et je ne me résous pas à le voir classé « neutre » dans ce classement parce que d’une certaine façon, cela ne me paraît pas conforme à ce que nous faisons.
Tous ces éléments montrent véritablement que les choix politiques que l’on fait s’inscrivent dans la tradition budgétaire et politique que porte la Gauche dans cette Collectivité, qui est celle de maintenir le pouvoir d’achat des habitants, de développer les services, de renforcer l’attractivité de la Ville. Vous comprendrez donc très aisément que nous soutiendrons ce budget avec enthousiasme, même s’il a été difficile à réaliser.